Angkor Vat
Angkor Vat fut construit par le roi Suryavarman II (qui régna
de 1113 à 1150) dans la première moitié du XIIe siècle.
À cette époque, le temple d'État au centre de la
capitale, le Baphûon, était dédié à
Siva. Comme Suryavarman II honorait Visnu, il décida de la construction
d'un nouveau temple au sud de la ville. Ceci explique que l'entrée
d'Angkor Vat est orientée vers l'ouest (vers Visnu), contrairement
aux autres temples khmers. Plus tard, le temple fut « détourné
» vers le culte de Bouddha avec un remaniement notable de sanctuaire
central.
Le complexe occupe une surface totale de 1500 mètres sur 1300
mètres.
Des douves et trois galeries encerclent le sanctuaire central. Depuis
l'ouest du complexe, une chaussée pavée longue de 200 mètres
permet de traverser les douves et mène à une large terrasse
précédant le magnifique gopura, qui marque l'entrée
principale de l'édifice central. La première galerie est
constituée de piliers carrés vers l'extérieur et
d'un mur aveugle vers l'intérieur. Le plafond entre les piliers
est décoré de rosaces en lotus. L'extérieur du mur
aveugle est décoré de fenêtres à colonnes,
d'apsaras (nymphes célestes), qu'on trouve sur toutes les galeries,
et de figures masculines qui dansent sur des animaux caracolants. À
partir de la première galerie, une avenue décorée
de nagas longue de 350 mètres mène à la seconde enceinte
à travers un parc. De part et d'autre de cette allée, on
rencontre d'abord deux constructions dont on ignore l'utilité (mais
qu'on appelle couramment « bibliothèques »), puis deux
petits bassins. On arrive à la seconde galerie par une plate-forme
surélevée flanquée de lions de part et d'autre d'une
cage d'escalier. Le mur intérieur de la seconde galerie est orné
d'un bas-relief narratif sur toute sa longueur. Sur le mur occidental
sont représentées des scènes de l'épopée
du Mahabharata.
Sur la partie sud-ouest, est représenté le Barattage de
l'Océan primordial : 92 bons génies, les deva, tirent d'un
côté et conjuguent leurs efforts avec 88 asura, les ennemis,
de l'autre côté ! Les démons portent la tête
du serpent et les dieux sa queue. Le serpent est lové au mont Mandala.
Le Barattage permettait d'extraire la liqueur d'immortalité.
Le roi Sûryavarman II est assis à l'indienne, jambes croisées,
au milieu de sa cour, Derrière lui se pressent les porteurs de
parasols, d'éventails, de chasse-mouches. Devant lui, des personnages
s'agenouillent pour lui rendre hommage. A ses côtés se tiennent
les grands personnages de la Cour et notamment les brahmanes reconnaissables
à leur visage allongé et fin. Ils portent les cheveux longs.
Leur vêtement est un sampot traditionnel, savamment drapé.
Les ascètes sont vêtus de simples pagnes, sans décoration.
Des femmes apportent des offrandes. Elles ont un simple cercle de métal
au cou, comme seul bijou. Ensuite le Roi s'apprête à partir
à la guerre, contre les Chams, les Viets ou les Môns du Ménam.
Juchés sur des éléphants, les chefs de guerre dominent
le défilé militaire. Le nombre de parasols indique le rang
de l'officier. Des cavaliers attestent l'existence du cheval à
cette époque. En tête marchent des soldats au visage mongolique,
les cheveux relevés et ornés de plumes ou de feuilles. Il
s'agit de mercenaires siamois. Les autres guerriers sont ceints d'un casque
surmonté de têtes d'oiseaux ou de fauves. Ils sont armés
d'une lance et d'un bouclier. Un petit poignard est suspendu à
leur collier. Les officiers disposent d'arcs et de flèches. Des
brahmanes accordent leur bénédiction au défilé
et des jongleurs apportent un peu de gaieté à cet événement
trop solennel. Cela n'est pas sans me rappeler des scènes de lutte
et de gymnastique de jeu qui ornent le temple de Ramsès III à
Medinet Habou.
D'autres panneaux décrivent la vie à la campagne. Nous
ne disposons pas malheureusement de descriptions de l'habitat de la campagne
et seuls sont présentés les palais. Ces représentations
de la campagne sont en rapport avec le culte de Krishna, incarnation de
Vishnou. Au pavillon d'angle sud-est, le jeune Krishna vole du beurre
plus loin, il soulève le mont Govardhana pour abriter les villageois
de l'orage déclenché par Indra.
Les surfaces sont entièrement sculptées, au détriment
de la qualité. Les vêtements sont simplifiés et les
plis juste incisés. La décoration est principalement faite
de représentations de dieux, d'hommes et d'animaux y compris le
lion bien quil semble quil ny en avait pas au Cambodge.
Les combats et les épisodes de légendes sont fréquents.
Les décorations florales sont réservées aux bordures,
aux moulures et aux chapiteaux. Les principaux matériaux utilisés
sont des grès de différentes couleurs et la latérite.
La pierre était découpée en blocs énormes
assemblés avec une grande précision sans utiliser de ciment,
probablement par rodage sur place.
La troisième galerie délimite un espace de 150 mètres
sur 200 mètres. On y pénètre par une terrasse en
forme de croix. Cet espace est découpé en trois niveaux,
reliés par de nombreux escaliers extérieurs. Ces niveaux
sont de dimensions décroissantes. Chaque niveau est formé
d'une terrasse entourée d'une galerie. Le plus élevé
est le sanctuaire, qui est surmonté en son centre d'une grande
tour de forme pyramidale. Des tours surmontent aussi les quatre angles
des terrasses des deux étages supérieurs.
La galerie extérieure du sanctuaire central, longue de 800 mètres,
est décorée de bas-reliefs décrivant des scènes
tirées d'épopées indiennes ou de l'histoire d'Angkor.
Trois galeries dont les voûtes sont supportées par des colonnes
mènent des trois portes occidentales de la troisième galerie
au deuxième niveau. Elles sont reliées par une galerie transversale,
qui forme donc quatre cuvettes carrées. La galerie du sud est surnommée
la galerie des mille Bouddhas, car les Khmers avaient coutume d'y laisser
des statues de Bouddha. La plupart de celles-ci furent détruites
pendant la guerre civile. De part et d'autres de ces galeries se trouvent
deux bibliothèques.
On atteint ainsi le deuxième niveau en traversant un portique
à travers une autre enceinte rectangulaire. On y trouve une surface
pavée, où se trouvent encore deux bibliothèques.
Ces cours pourraient originellement avoir été inondées,
afin de représenter l'océan entourant le mythique mont Meru.
Elle est traversée par une courte allée soutenue par des
piliers et menant au troisième niveau.
On atteint celui-ci par douze escaliers très raides, qui représentent
la difficulté d'atteindre le royaume des dieux. Au sommet de ces
escaliers se trouve une plate-forme pavée de forme carrée
divisée en quatre cours par deux couloirs surélevés
qui se coupent à angles droits. Un autre couloir surélevé
court le long du bord extérieur de la plate-forme, entourant l'ensemble
du niveau. À chaque coin de ce couloir se trouve une tour et on
en trouve une cinquième au milieu de la plate-forme. Ces cinq tours
forment la silhouette bien connue d'Angkor Vat. La base carrée
de la tour centrale contient un petit sanctuaire sur chaque face, derrière
lesquels se trouve le sanctuaire central. Ces sanctuaires sont reliés
par des galeries sur les toitures desquelles est représenté
le corps d'un serpent se terminant par des têtes de lions ou de
garudas. Des linteaux et des frontons sculptés ornent les entrées
des galeries et des sanctuaires.
Le sanctuaire central était initialement dédié au
dieu hindouiste Visnu, mais sa statue d'or a été enlevée
et on trouve aujourd'hui dans chaque sanctuaire des statues de Bouddha.
Angkor Vat est le temple montagne par excellence, s'élevant à
65 m. Des fouilles ont révélé un puits descendant
au niveau du sol sous le sanctuaire et contenant les tablettes de la fondation
sous forme de disques d'or. Cette tradition de la fondation d'un temple
est similaire à celle des temples sumériens (là on
déposait des tablettes) et similaire aussi à la cérémonie
de la " première pierre ". On les lit en tenant le temple
à main gauche, ce qui signifie que l'on doit faire le tour dans
le sens inverse des aiguilles d'une montre. Ce sens de circumambulation
est réservé au rite des morts, la prasavya.
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