Petite introduction sur l'histoire pour comprendre l'Ouzbékistan
L'Ouzbékistan évoque la Route de la soie, les nomades et leurs
yourtes, les héros légendaires, Gengis Khan, Tamerlan, les coupoles
bleu turquoise des mausolées et des mosquées. Mais l'histoire
de l'Asie centrale est tumultueuse : les conquérants sont venus de l'Ouest
(la Macédoine), de l'Est (la Mongolie, la Chine), du sud-Est (la Perse)
ou du Nord (la Russie) et ont tour à tour détruit ou bâti
des empires, des villes, des cultures, tandis que les peuples se mélangeaient
au rythme des migrations, assimilant les religieux des conquérants, le
bouddhisme, l'islam, leurs langues, leurs cultures, leur écriture (le
cyrillique étant le dernier apport). D'un point de vue géopolitique,
l'Ouzbékistan est une ancienne république de l'URSS qui a acquis
son indépendance - sans le vouloir - le 31 août 1991.
Les premières traces d'irrigation volontaire (cultures de décrue)
en Asie centrale ont été trouvées dans les années
1930 par des archéologues russes. Elles datent de 5 000 av JC et témoignent
des premières civilisations sédentaires, dans un monde dominé
par les nomades scythes et sarmates. Dès le VIe siècle
av. JC, des envahisseurs ont déferlé sur l'Asie centrale : les
populations sédentaires sont soumises par des nomades qui détruisent
leurs villes et en reconstruisent de nouvelles. Une fois bien installés,
ils sont à leur tour envahis par des nouveaux nomades conquérants.
L'enjeu est la possession des comptoirs des routes marchandes qui relient l'Est
(la Chine via la Mongolie) à l'Ouest (la Mésopotamie), le Nord
(la Russie) au Sud (la Perse).
Dans les temps très reculés, on faisait le commerce du lapis-lazuli,
du cuivre, de l'encens, depuis la Mésopotamie jusqu'à la muraille
de Chine. La soie chinoise ne franchissait pas encore les déserts et
son commerce ne débute qu'au Ier siècle av. J.-C. Au XIVe siècle, Ruy González de Clavijo, ambassadeur d'Henri III de Castille
et de Léon, disait ceci : " De Russie et de Tartarie, lui arrivent
des cuirs et des toiles, du Cathay [la Chine] des tissus de soie, qui sont les
meilleurs dans cette partie du monde. Du Cathay arrivent aussi du musc (
),
des rubis, et des diamants (
), des perles, de la rhubarbe et d'autres
épices (
). L'Inde envoie à Samarcande des épices
fines, qui sont les meilleures de cette catégorie, ainsi que des noix
de muscade, des clous de girofle, du macis, de la fleur de cannelle, du gingembre
".
Cette route des marchands, qu'on appelle Route de l'Or, et aussi Route
de la Soie, fut aussi empruntée par Alexandre le Grand, parti de
Macédoine, Gengis Khan (" Khan " se prononce " Ran ")
et Tamerlan. Cette route favorisa la diffusion des religions : les moines bouddhistes
puis les arabes l'empruntèrent, en sens opposé. Elle véhicula
aussi les progrès techniques comme l'imprimerie, le papier, et les connaissances
scientifiques (mathématiques, astronomie). Mais lorsqu'en 1497 Vasco
de Gama découvrira la route maritime de l'Inde par le Cap de Bonne Espérance
c'en sera fini des routes caravanières de l'Asie centrale.
L'empire perse de Cyrus engloba l'Asie centrale au VIe siècle
av JC et y fonda un royaume, la Sogdiane, entre les fleuves Amou-Daria au Sud
et Syr-Daria au Nord.
En 328 av J.-C., Alexandre
le Grand plante son étendard sur les forts de Boukhara et Samarcande
au terme de combats acharnés. Le peuple se soulève et parvient
à reprendre Samarcande. La résistance de la Sogdiane et de ses
alliés, la Bactriane, embarrasse Alexandre le Grand qui décide
de sceller la paix en épousant la fille du chef rebelle, la belle Roxane.
Deux ans après, l'empereur meurt, emporté par une fièvre.
Il est à peine âgé de 32 ans. Son empire est éclaté
entre ses généraux. La Bactriane qui a englobé la Sogdiane
en profite pour reprendre son indépendance. A la fin du Ier siècle
de notre ère, les Kouchans, descendants des Yu-Tche, règnent sur
un empire allant de Merv (Turkménistan) à Khotan (Chine) et du
Syr Daria à la mer d'Oman.
Les villes de Boukhara et Samarcande se gèrent de manière autonome
tout en respectant les lois des nomades qui règnent sur les routes caravanières
: les Kouchanes, et, dès la première moitié du IIIe siècle,
les Perses Sassanides.
Au VIe siècle, les Turks déferlent, venus de l'Est, de
Mongolie. Ils fondent des royaumes locaux : les Kirghizes et les Ouigours.
Mais à partir de 623, une autre déferlante, venue de l'Ouest,
s'abat sur l'Asie centrale : les arabes, porteurs de leur religion musulmane.
Ils franchissent l'Amou-Daria en 654. La conquête de Boukhara leur prend
3 années (706-09) et 4 campagnes, tellement ses habitants résistent.
Leur conquête est arrêtée par les Chinois, au niveau du Kazakhstan
actuel. On dit que ce sont les prisonniers chinois de la bataille de Talas qui
transmirent le procédé de fabrication du papier aux gens de Samarcande.
Même si les arabes ne restent maîtres de la région que pendant
200 ans, ils ont laissé une empreinte considérable, religieuse,
culturelle et architecturale. La décoration est faite de calligraphies
arabes à défaut de représentation humaine proscrite par
la religion.
Mausolée samanide
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Au IXe siècle, un état indépendant samanide (d'origine
perse) se construit autour de Boukhara. Leurs tombaux, enfouis sous le sable,
ont ressurgi par enchantement au XXe siècle, dans un état
de conservation étonnant.
A cette époque, les oasis sont un foyer intellectuel et religieux :
à Boukhara, ibn Sina, connu en Occident comme Avicenne, né en
980, écrit un traité de médecine, à partir des découvertes
des savants grecs et arabes, tandis qu'à Khiva, Al-Bîrunî
(973-1048) émet l'hypothèse que la terre tourne sur son axe.
En 999, la dynastie samanide s'effondre sous la pression des Turks.
Au XIe siècle, les Turks Seldjoukides dominent l'Asie centrale,
jusqu'à la Turquie, mais laissent le roi de Khorezm, à Ourgentch,
non loin de Khiva, régner sur sa région.
Gengis Khan est né entre 1162 et 1167 en Mongolie. Il prend la tête
d'une armée mongole forte de 200.000 hommes contre le royaume de Khorezm,
pour les punir d'avoir attaqué une caravane de commerçants. Le
roi de Khorezm s'enfuit, poursuivi par les troupes mongoles. Celles-ci pillent
et dévastent tout sur leur passage. Boukhara puis Samarcande tombent
entre leurs mains. Les habitants sont décapités par centaines.
L'empire de Gengis Khan ne cesse de s'agrandir. Il sera un des plus grands jamais
créés, allant du Pacifique au Danube. Gengis Khan utilise son
génie politique et militaire pour unifier les tribus turques et mongoles
de l'Asie centrale. La surveillance qu'il exerce sur les routes commerçantes
est efficace et permet l'expansion du commerce. Marco Polo peut traverser les
déserts sans être inquiété. C'est une période
sûre pour quiconque se soumet à la loi mongole.
Avant de mourir en 1227 (à Qingshui, dans l'actuel Gansu), Gengis Khan
partage son empire entre ses 4 fils : le royaume de Samarcande échoit
à son second fils, Tchaghatay. Mais débute alors une période
de déclin
. en attendant le prochain empereur
Timur
naît en 1336, dans la ville de Kech, au sud de Samarcande. Une blessure
à la jambe lors d'un combat lui vaut le surnom de Lenk, " le boiteux
", d'où Timur Lenk et par déformation, " Tamerlan ".
Stratège de génie, il n'a que 21 ans quand il entreprend de conquérir
le Turkestan et l'Asie centrale. Et il y parvient et étend son influence
de la Mer noire à l'Indus. Comme Gengis Khan, il fait décapiter
ses ennemis. Les guerriers doivent ramener des têtes, pour preuve de leur
courage. Celui qui n'en ramène pas assez risque la sienne. Si un autre
guerrier en ramène plus que le nombre désiré, il peut les
revendre à ceux qui n'en ont pas assez.
En 1370, il choisit Samarcande comme capitale, car elle est proche de sa ville
natale. En 1401, il triomphe à Bagdad et Damas et pousse jusqu'en Turquie,
à Izmir.
Tamerlan meurt en 1405, d'une pneumonie, sur la route de la Chine qu'il veut
conquérir. Son corps est ramené à Samarcande (dans le plus
grand secret pour ne pas affoler ses troupes) et enseveli dans le mausolée
qu'il a construit pour son petit fils, Mohammed Sultan. Le mausolée s'appelle
depuis Gour Emir ou Tombeau de l'émir.
La suite de l'histoire sera décrite en visitant les villes de Boukhara
et Samarcande.
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